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TEEN

tH E WAY AND COLOR

Vous avez sans doute déjà fait cette expérience qui consiste à fixer un objet avec un Å“il fermé puis à le rouvrir tandis que l'autre se ferme. L'illusion qui en résulte alors est telle que l'objet en question semble s'être déplacé. 

C'est à peu de choses prêt le procédé qu'utilise Teen avec son nouvel album "The way and color". 

Succédant à "In Limbo" paru en 2012, "The way and color" semble être le résultat d'un déplacement vers un Rn'b qui tranche radicalement avec le rock psychédélique du premier album. Et pourtant, il ne s'agit ici que d'une illusion puisque en écoutant attentivement l'album sans se laisser influencer par la première impression, la griffe de Teen réapparait comme par magie. 

Tout se passe alors comme si vous aviez ouvert les deux yeux. Vous embrassez alors d'un seul coup la richesse de "The way and color". Celle-ci même qui fait de cet album une réussite à la hauteur du précédent même si les saveurs n'en sont pas les mêmes. 

Il suffit d'entrer dans ce disque sans a priori pour se laisser immédiatement saisir par un "Rose 4 U" qui vous caresse et vous prend par la main pour vous conduire de titre en titre avec une facilité déconcertante. Presque trop d'ailleurs. A tel point qu'il faudra fournir un effort d'écoute inattendu pour un album si simple, afin de ne pas passer à côté et le prendre pour ce qu'il n'est pas: un disque banal, sympathique mais sans relief. 

Bien au contraire, il porte en lui la synthèse de la musique populaire et du psychédélisme qui marqua les débuts du groupe. Rien de plus magique que de se laisser berner de la sorte par un album qui cache une telle profondeur derrière une façade aussi aguichante. C'est peut-être la vraie valeur de toute oeuvre finalement. 

 

S.D

 

 

BRIAN ENO & KARL HYDE

SOMEDAY WORLD

Depuis son arrivée sur le label WARP, Brian Eno est prolifique. Assurant au minimum une production par an, il continu comme au premier jour de défricher des territoires sonores synthétiques en tentant d'y retrouver le son des instruments "naturels". 

En s'associant ici avec Karl Hyde, grand nom de la scène synthétique britannique et tête pensante d'Underworld, Brian Eno a peut être trouvé le secret qu'il tentait de percer depuis toutes ces années. 

 

En véritable alchimiste du son, il trouve ici un élément de sa pierre philosophale en parvenant à conjuguer une recherche sonore entamée avec ses "ambients", son goût pour les sonorités électroniques qu'il affectionne depuis son départ fracassant de Roxy Music en 1973, et sa foi dans une pop immédiate, celle-là même qui lui fit produire des albums de U2 ou Coldplay, leur apportant ainsi parmi leurs plus gros succès. 

 

Ce mélange étonnant déroute car si le travail sur les ambiances étaient très souvent passionnant, si sa recherche de la pop avait frôlé la perfection avec "Before and After Science" ou "Another Green World" avant d'atteindre le grand public en participant à la trilogie berlinoise de David Bowie (Heroes, c'est lui); on est ici troublé dans un premier temps par la facilité qui habite chacun des titres de "Someday World". Est-ce la présence d'un membre de Coldplay qui perturbe à ce point? Pas sûr finalement. C'est sans doute au contraire, une forme de révélation: en prenant les précédents albums ("Son Lux" mis à part à cause de sa radicalité) parus sur WARP pour des albums aboutis, nous faisions sans doute fausse route. Ils étaient le cheminement qui conduisait à cet album.

 

En s'adjoignant comme co-auteur, le protéiforme Karl Hyde, Brian Eno trouve le partenaire idéal pour enfin laisser Ã©clater des couleurs jusqu'ici restées discrètes mais qui trouvent dans l'absence de complexe ici revendiquées, une belle occasion de jouer leur partition avec un éclat remarquable. C'est effectivement en ouvrant les micros à une merveilleuse afrobeat dont on sait Karl Hyde friand, que la couleur de "Someday World" trouve son existence. Associée à une pop volontairement lisse et à l'electronica du duo, elle donne tout le relief nécessaire pour faire de cet album un véritable enchantement musical qui submerge immédiatement l'auditeur d'e son évidence. En outre' "Someday World"  puise dans un mélange de cultures ici rapprochées (ambiant, electronica, pop et afrobeat) la force de son ouverture et de sa beauté explosive. 

 

En osant affronter la musique sous sa forme la plus populaire en la mâtinant de ses multiples trouvailles, le duo se trace de nouveaux chemins sans aucun doute propices à de nouvelles recherches, de nouvelles expériences et font de ce "Someday World" une magnifique expérience qui semble achever un cycle pour en ouvrir un nouveau sans aucun doute tout aussi passionnant.

 

S.D

 

 

The Brian Jonestown Massacre

Revelation

On ne répétera jamais assez à quel point le groupe d'Anton Newcombe est important dans le paysage musical actuel. Avec son sens du désespoir et de la crasse il sème les albums comme autant d'indices renvoyant à une musique dépourvue d'artifices. Une musique de la vérité qui ne cherche pas à plaire mais à nous offrir ce qu'il peut y avoir de plus juste et de plus séminal dans la pop. 

Tout au long d'une discographie exemplaire de ce point de vue là, The Brian Jonestown Massacre n'a cherché qu'une chose: le plaisir pure. Celui qui naît de cendres fumantes au milieu d'une époque concentrée sur le faux, le paraître et l'oubli. Parvenant ainsi à créer des fulgurances qui font s'entrechoquer l'esprit du punk avec celui d'un rock psychédélique, il recréait une pop audacieuse à la fois régressive et en avance sur son époque. Une pop rugueuse donc, une musique sauvage et indomptable.

 

Ce mois-ci, le groupe sort son nouvel album et il faut se ruer avidement sur cet opus qui trouve la clarté dans le dédale obscur qu'il a dessiné jusqu'ici. Car là où beaucoup de groupes jouent la carte du désastre de notre époque, Anton Newcombe semble lui s'y mouvoir avec une aisance remarquable. C'est ainsi qu'il parvient à ajouter la lumière au tableau qu'il dresse depuis tant d'année, éclairant ainsi en partie sa musique en lui offrant des couleurs jusqu'ici inédites. Est ce un hasard si cet album s'appelle "Revelation"? Bien sûr que non. Le groupe atteint un état de vérité intense, presque mystique, sur lequel la voix de Newcombe est plus claire que jamais. 

 

"Revelation" se déroule dans un moment simple à l'extrême et se laisse écouter avec un plaisir communicatif. Mieux, il happe son auditeur tant l'évidence de sa sincérité est frappante. 

 

Ce disque réalise donc l'exploit de surpasser ses prédécesseurs et d'installer définitivement le groupe dans la position qu'il redoutait pourtant: tout en haut de la scène contemporaine. Ou quand la réussite parvient à un tel stade qu'elle en devient un échec. Tant mieux pour nous. 

 

 

S.D

 

 

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